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Entreprises : des profits ou une Mission ?
information fournie par Le Cercle des économistes 27/06/2022 à 08:11

Jean-Paul Betbèze
Jean-Paul Betbèze

Jean-Paul Betbèze

JPBetbèze

économiste

http://www.jpbetbeze.com/

Les entreprises ont une seule mission, nous diront d'abord nombre d'investisseurs : le profit, qu'elles le distribuent en dividendes ou le gardent, pour investir en équipements ou encore pour acquérir un concurrent et s'étendre, avec plus de profits à la clef. (Crédits photo : Unsplash - Matthew Henry )

Les entreprises ont une seule mission, nous diront d'abord nombre d'investisseurs : le profit, qu'elles le distribuent en dividendes ou le gardent, pour investir en équipements ou encore pour acquérir un concurrent et s'étendre, avec plus de profits à la clef. (Crédits photo : Unsplash - Matthew Henry )

Pandémie et guerre en Ukraine rebattent les cartes jusque dans la vie quotidienne des entreprises. Plus loin que la simple notion de profits ou de croissance, la RSE s'impose plus que jamais. Jean-Paul Betbeze explique pourquoi, dans le contexte actuel et à l'avenir, investisseurs et actionnaires vont privilégier de plus en plus ce nouveau paradigme

Quelle question, au moment où on s'inquiète de récession ! Les entreprises ont une seule mission, nous diront d'abord nombre d'investisseurs : le profit, qu'elles le distribuent en dividendes ou le gardent, pour investir en équipements ou encore pour acquérir un concurrent et s'étendre, avec plus de profits à la clef. Aujourd'hui plus que jamais. Oui bien sûr, mais ce n'est pas suffisant, ajouteront alors un nombre (croissant) d'autres investisseurs. L'entreprise s'inscrit dans la cité. Elle doit reprendre, sinon promouvoir, ses valeurs, qu'il s'agisse d'égalité hommes femmes, de formation permanente et maintenant, de plus en plus, d'écologie.

Mais ceci coûte, diront les premiers qui ajouteront que l'entreprise est sociale de fait, puisqu'elle emploie des salariés, les augmente, paye des impôts locaux et nationaux, tout en offrant des produits utiles. C'est vrai, mais ne suffit pas, ajouteront les seconds. Elle doit former constamment ses salariés, notamment ceux qui ont les plus bas salaires, s'occuper de leur bien-être et participer à l'amélioration de l'environnement. Elle doit alors analyser la source de ce qu'elle produit, les matériaux utilisés par ses fournisseurs et les conditions de travail qu'ils offrent, en Inde ou au Pakistan, plus les moyens de transport utilisés pour acheminer leurs produits, tout ceci pour calculer aussi précisément que possible son « empreinte carbone », pour la réduire.

Mais c'est à l'Inde ou au Pakistan de s'en occuper ! Dans son célèbre article du 13 septembre 1970, dans le New York Times, Milton Friedman étrille «les hommes d'entreprise qui parlent éloquemment de la "responsabilité sociale de l'entreprise"». Ceci lui rappelle ce Français qui parlait en prose sans le savoir : le Bourgeois gentilhomme, qu'il ne cite pas. Pour lui, «que l'entreprise ait une "conscience sociale" et prenne sérieusement ses responsabilités d'offrir de l'emploi, d'éliminer la discrimination, d'éviter la pollution et tout ce que l'on voudra dans la moisson actuelle des réformateurs… est prêcher du pur socialisme ». Il poursuit : «Seules les personnes peuvent avoir des responsabilités… mais une entreprise est une personne artificielle qui ne peut avoir de responsabilités.»

Bien sûr, poursuit-il, le dirigeant d'entreprise est lui une personne, tout comme un actionnaire : pour satisfaire comme ils l'entendent l'un et l'autre leurs «responsabilités sociales», ils peuvent chacun disposer de leur temps et de leur argent. Mais si le businessman ne veut pas trop augmenter ses prix, pour lutter contre l'inflation, ou dépense pour réduire la pollution au-delà de ce qui est requis par la loi, il utilise en fait un argent qui ne lui appartient pas, en réduisant celui des actionnaires : c'est du vol.

Mais du tout ! Les actionnaires aiment de plus en plus les entreprises qui se donnent des objectifs sociaux, des «missions», pour la bonne raison qu'elles ont de meilleurs résultats ! Les gestionnaires de fond en viennent aussi à demander aux entreprises de définir leur « raison d'être » pour conforter au moins leur choix d'investissement, sinon les accroître, en relation avec l'extérieur. Sans aller jusqu'à une « mission » qu'elles se donnent, inscrivent dans leurs statuts et publient, cette « raison d'être » a l'avantage de faire discuter l'entreprise, en interne et en externe, pour aligner ses objectifs, ce qui peut réduire au moins ses tensions internes. On sait que de plus en plus d'entreprises sont soucieuses de cette évolution, d'où les votes en Assemblée Générale sur les salaires des dirigeants, "say on pay", en règle très générale acceptés, mais où l'important est le pourcentage de votes favorables obtenus, confortant les décisions des dirigeants et la pyramide des rémunérations.

Tout est dit : l'entreprise n'est plus un système simple, orienté sur le profit dans une conception à la Marx ou à la Friedman, ici réunis, mais dans une vision plus transparente de façon à être comprise, sinon aimée par son environnement. Pas le choix. Dans un monde en tensions croissantes, avec un décor de mondialisation non inflationniste et de « doux commerce » (Montesquieu) qui s'estompe, entre menaces russes et réchauffement climatique, nous voilà devant des chaînes de valeur ajoutée à reconstruire, en Europe et en Afrique notamment, de manière plus autonome et résiliente.

On comprend qu'il s'agit là d'une Mission très nouvelle et exigeante, risquée surtout, qui demandera bien plus de profits, un vrai projet !

2 commentaires

  • 01 juillet 10:09

    Ça n'est qu'une mode, particulièrement européenne, elle passera. En attendant, Il faut rester dans le vent!


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